Explications détaillées de zazen et kin-hin

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Kusens de Maître Kosen
Explications détaillées de zazen et kin-hin
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Zazen est une posture qui est pratiquée depuis la nuit des temps, même en Inde. Elle existait déjà avant l’apparition du Bouddha. On l’appelle souvent la posture du Bouddha, mais dans les textes anciens, on l’appelle « la posture parfaite ».

Quand j’ai débuté le zazen, notre maître Deshimaru répétait toujours :

La posture est le plus important.

On ne pensait pas que pour méditer, il était nécessaire d’être si pointilleux.

Pourquoi l’appelle-t-on la posture parfaite ? Parce que chaque muscle, chaque partie du corps est complémentaire. On va commencer par l’assise en elle-même. On ne doit pas être assis sur l’arrière des fesses, mais au contraire, sur l’avant des fesses, sur le haut des cuisses, sur les ischions. On n’est pas vraiment assis, on est comme si on était dressé, comme si on était debout. C’est une position dynamique.

Pour ce faire, il faut basculer le bassin : au lieu d’avoir le dos rond, il faut avoir une légère cambrure au niveau de la cinquième vertèbre lombaire. Les Japonais, qui ont une morphologie assez caractéristique, un peu différente de celle des Européens, ont du mal à basculer le bassin. Pour expliquer les choses, pour donner une idée de la bascule du bassin, ils disent : « Il faut faire comme si l’anus regardait le soleil ».

De cette manière, on est dans une position dynamique, sans faire d’effort. Les jambes sont repliées en position du lotus ou du demi-lotus, ou même du quart de lotus, qui consiste à mettre juste le pied sur la cheville opposée.

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Ce qui est important, c’est que les genoux touchent le sol. On dit tout le temps : « Il faut pousser la terre avec les genoux ». Mais quand vous avez le pied sur la cuisse opposée, dans la position du lotus ou du demi-lotus, plus vous relâchez vos jambes, plus votre pied va pousser les genoux contre le sol. Plus vous vous relaxez, plus vous êtes dynamique. C’est la complémentarité des énergies dont je parlais tout à l’heure. La posture est parfaite. Plus vous vous laissez aller, plus vous êtes droit, plus vous êtes tonique, également.

Cette bascule du bassin vous aide à relâcher toute la masse abdominale, relâcher les tensions dans les intestins. La colonne vertébrale doit être tendue et tirer le plus possible, et on pousse le ciel avec le sommet du crâne, avec la fontanelle.On pousse la terre avec les genoux, on pousse le ciel avec la tête.

Posture des mains et des bras

On place la main gauche dans la main droite. Les deux majeurs sont superposés. Les pouces sont en contact l’un avec l’autre, en formant une ligne bien horizontale :les pouces ne doivent ni avoir la forme d’une montagne ni celle d’une vallée. Ils ne doivent ni tomber ni être trop contractés. On contrôle la tension du corps à partir des mains. Vous surveillez si vos mains sont tendues, nerveuses ou si elles sont détendues.

La pression des pouces l’un contre l’autre doit être douce et délicate. Les coudes sont légèrement écartés du corps, les épaules sont relâchées vers le bas. On ouvre bien la cage thoracique, on dégage bien le cœur.

Posture de la tête

J’ai dit tout à l’heure : « on pousse le ciel avec la tête ». La position de la tête est très importante. Mon maître répétait toujours :

Rentrez le menton et étirez la nuque.

Ouvrez la partie primitive du cerveau qui est derrière la nuque en ouvrant l’arrière de la nuque, comme si vous ouvriez une fenêtre.

La tête doit rester droite. Elle ne doit pas pencher en avant ni être trop en arrière. Le buste doit être droit, également.

Le nez et le nombril sont sur une même ligne, les oreilles et les épaules sont sur un même plan. C’est la position de l’être humain, tout simplement parfaite, équilibrée.

Attitude de l’esprit et respiration

On est calme, mais pas endormi. On est dynamique, mais pas nerveux, pas énervé. On respire par le nez tranquillement. On laisse la respiration prendre son rythme. Quand on observe sa respiration, on fait particulièrement attention à l’expiration. On expire et quand l’expiration est terminée, on laisse l’air remplir les poumons automatiquement.

Petit à petit, on donne la priorité à l’expiration. C’est le contraire de ce qu’on a tendance à faire dans la vie quotidienne où on veut prendre d’abord et donner ensuite.

Dans le théâtre ou dans le mime, la respiration a une grande importance. Quand Pierrot offre une fleur à sa fiancée, il va expirer au moment de donner la fleur. S’il inspire à ce moment-là, la sensation qu’aura le spectateur sera inversée. Il aura l’impression qu’il ne veut pas donner ou qu’il donne à contrecœur.

Quand on a peur, on inspire. Quand on est malade, malheureux quand on pleure, on inspire.

Dans le zen, on commence par l’expiration. De toute façon, expiration et inspiration se suivent. Il y a une expiration, une inspiration, une expiration, une inspiration, depuis notre naissance jusqu’à notre mort.

Nous, en Occident, on considère que l’expiration est venue en premier. Alors quand on nous dit : « respire ! », on expire, on donne d’abord et après on reçoit. Ça a une incidence sur notre comportement dans la vie quotidienne.

Donc, on s’aperçoit que l’expiration est plus longue que l’inspiration. Et que l’inspiration se fait automatiquement. Il n’y a pas besoin de faire d’effort, il n’y a pas besoin de s’inquiéter. Elle va venir, on va la recevoir.

Dans le langage du corps et de la posture, on découvre une infinité d’enseignements et seulement pratiquer un peu cette méditation, ce zazen, cette posture de Bouddha, transforme rapidement notre manière de nous comporter dans la vie.

Tous les débutants qui sont venus aujourd’hui, vous avez tous de très belles postures.

Kyosaku

Le kyosaku, c’est le bâton d’éveil. Quand on se sent trop tendu ou qu’on a du mal à se concentrer, on peut joindre les mains devant soi à la hauteur du nez et le kyosaku passera vous donner un coup sur un point d’acupuncture bien bien précis. C’est un mini-massage.

Fin du premier zazen et kin-hin

Vous basculez de droite à gauche avec une amplitude de plus en plus grande. Vous défaites doucement vos jambes, sans violence et vous vous levez doucement. Parfois, vous avez des fourmis dans les jambes. Laissez dans ce cas les sensations revenir dans les jambes tranquillement. Dès que vous pouvez vous lever, vous mettez votre coussin contre le mur.

On va former deux grands cercles, qui vont chacun tourner dans le sens des aiguilles d’une montre.

Vous positionnez la dernière phalange du pouce gauche dans le poing gauche et vous serrez le poing. C’est la position des bébés. Je ne sais pas si vous avez déjà vu les nouveau-nés. Ils ont souvent cette posture-là. Ils prennent leur pouce dans leur poing.

Vous placez la racine du pouce gauche contre le sternum, dans un petit creux qu’il y a sous le sternum et au-dessus du plexus solaire. Vous recouvrez le poing gauche avec la main droite, vous laissez vos avant-bras bien horizontaux.

Je passerai vous corriger, ne vous inquiétez pas. Les paumes des mains parallèles au sol.

Tout ça, c’est des recettes à apprendre par cœur, si je puis dire. Tous les petits détails, il faut les connaître par cœur. Les avant-bras horizontaux, les épaules, les coudes décontractés.

On relâche, on libère quelque chose. Dès qu’on libère, on acquiert de l’énergie, parce que toute l’énergie qui a été prise par la tension se transforme en énergie bénéfique.

Il y en a qui ont des facilités, mais ce n’est pas forcément ceux qui continuent le plus longtemps. Rentrez bien le menton.

Une fois qu’on a cette posture correcte, on va avancer en rythme, avec la respiration. On n’avance pas très vite, on avance par demi-pas, de la longueur d’un demi-pied.

Pendant l’expiration, qui est plus longue que l’inspiration, on va positionner le poids du corps, petit à petit, sur la jambe avant, en tendant le genou, en poussant le sol avec l’avant du pied, spécialement avec la racine du gros orteil et en expirant. On peut même, pendant ce temps-là, presser doucement les mains l’une contre l’autre.

Quand l’expiration est terminée, on laisse l’air remplir les poumons, et pendant l’inspiration, assez courte, la jambe arrière passe en avant, et on continue à nouveau une longue expiration. On porte le poids progressivement sur la jambe avant, on tend le genou, on serre un peu les fesses, on tend la colonne, on tend la nuque, on pousse le ciel avec la tête. On pousse le sol avec la racine du gros orteil. En gros, on s’étire, mais en même temps, on pèse.

Zen et arts martiaux

Dans les arts martiaux, par exemple, dans l’art du sabre, la respiration est très importante. Ils ont repris la sagesse du zazen dans leurs techniques de combat. Quand on est sur l’expiration, en général, l’ennemi n’attaque pas. Il attend l’inspiration, où l’on devient plus vulnérable. Donc, plus on a une expiration longue, plus on est ancré dans le sol, et moins on est vulnérable.

On pose le regard à 45 degrés vers le sol et on garde les yeux mi-clos. On ne doit rien regarder en particulier. On ne regarde pas les objets, on ne regarde pas les détails sur le plancher. On ne regarde pas le pantalon de la personne qui est devant vous. Les yeux sont ouverts, mais on ne regarde pas.

De même, quand je parle ou quand je vous explique quelque chose ou que je donne un enseignement, vous l’entendez, mais vous ne l’écoutez pas. Au lieu de se servir du cerveau gauche, on va se servir du cerveau droit.

On voit, mais on ne regarde pas. On s’aperçoit qu’au lieu de fixer son attention sur une chose, sur un point, on peut tout voir autour de soi. En zazen, c’est la même chose. On garde les yeux mi-clos.

Gardez les paumes des mains bien parallèles au sol et les avant-bras bien horizontaux. Quand vous arrivez à l’angle du dojo, tournez à angle droit.

Après le coup de cloche, suivez la personne qui vous précède sans laisser d’espace. Vous faites tout le tour du cercle jusqu’à revenir à votre emplacement initial.

Il y a tout un rituel pour s’asseoir sur son coussin. Le zafu, c’est le siège du Bouddha. Il est cousu de manière traditionnelle avec 22 plis. On ne marche pas sur son zafu, on ne donne pas un coup de pied dedans. Quand on va s’asseoir, on fait le tour du zafu par la gauche vers la droite. On se positionne correctement comme tout à l’heure. On peut changer de jambe si c’est possible. Quand vous vous positionnez, ouvrez bien l’articulation sacro-iliaque.

Calmer le mental

Cette posture de zazen est censée calmer le mental.

Mon maître expliquait :

Quand on fait attention à tous les points de la posture, quand on vérifie tous les points de la posture, le mental est suffisamment occupé, il n’a pas le temps de penser à ces choses personnelles.

Cela dit, les pensées passent. C’est comme les nuages dans le ciel. Parfois, il y en a beaucoup, parfois il n’y en a que quelques-uns.

En zazen, on est comme une montagne. On n’a jamais vu une montagne bouger parce qu’il y avait un nuage qui passait. Donc la phrase adéquate que nous répétait notre maître, c’était : « Laissez passer, laissez passer ».

Cérémonie

Après le zazen, il va y avoir une petite cérémonie traditionnelle très simple. La cérémonie, c’est la même chose que zazen. D’ailleurs, parfois, on dit que le zazen est la plus haute cérémonie. C’est exprimer avec le corps ce qu’on ne peut pas dire ou expliquer avec les mots.

En particulier la prosternation, où on va se toucher la terre avec le front. Ce n’est pas une dévotion à un dieu, c’est énergétique. Tous les êtres humains ont les pieds enracinés dans le sol de notre Terre, mais chacun de nous a la tête qui vise dans une direction différente. Quand tous les êtres humains sont debout sur la planète, chacun vise avec sa tête une direction différente.

Mais par contre, tous les pieds sont unis dans la même direction, dans la même racine qui est le centre de la Terre. On a tous les pieds qui vont vers le centre de la Terre, donc on est complètement ensemble et en même temps, chacun est totalement lui-même, uniquement lui-même, souverain.

Le fait de toucher le sol avec sa tête, son cerveau, ça rend plus simple, ça simplifie, ça guérit l’esprit. On réinitialise son cerveau en le pointant vers le centre de la Terre. Ça a tout à voir avec le comportementalisme, le béhaviorisme.

En Europe, nos cérémonies à nous sont un peu brouillonnes, mais au Japon, spécialement au temple de Sôjiji qui est connu pour ça, il y a de très belles cérémonies. C’est presque de la chorégraphie. Mais même si vous connaissez peu de remèdes, si vous savez vous en servir, ça peut déjà être très efficace.