Published: 28/05/2016 | Updated: 05/06/2024
Maître Deshimaru nous parlait souvent de satori et de mayoi. Satori, c’est l’éveil, la libération ; mayoi, c’est la complication, la souffrance, la complexité de la vie. Il parlait également de samsara. C’est un peu le même principe. Nirvana et samsara sont des concepts antagonistes dans la philosophie bouddhiste.
Le Bouddha, une fois éveillé, déclare à ses premiers disciples :
La vie est souffrance.
La première chose dont il faut prendre conscience, c’est que la vie est souffrance. Alors, il explique pourquoi. Il dit :
Perdre ce qu’on aime, ce qui nous fait le plus plaisir, nous fait le plus souffrir.
Par exemple, si on aime beaucoup quelqu’un, plus on aime quelqu’un, plus on souffre de le quitter. Donc, le plaisir lui-même, le bonheur lui-même engendrent des souffrances, etc. C’est ce qu’on appelle le samsara, la suite des morts et des renaissances, l’enchaînement du karma.
Il dit que quand on a pris conscience que le monde est souffrance, que la souffrance et le plaisir sont mélangés et indifférenciables à la fin, pour guérir cette souffrance, pour s’en libérer, il y a le nirvana.
Le nirvana, c’est le processus opposé à l’attachement à la vie, c’est-à-dire dénouer, défaire, se détacher et maintenir un équilibre entre samsara et nirvana tout le temps. Si vous êtes seulement dans le nirvana, vous êtes comme mort, et si vous êtes seulement dans le samsara, vous êtes dans la souffrance. Mais si vous équilibrez les deux, alors vous pouvez vivre une vie intéressante, créative, et en être détaché.
C’est comme quand on se lave, qu’on enlève la saleté, la sueur. Quand on fait zazen, on détache les nœuds, on enlève la souffrance viscérale, on abandonne les attachements, on lâche les désirs, on arrête la compétition, on stoppe l’angoisse et on retourne vers le nirvana. À la fin, le Bouddha dit qu’il ne faut pas être fanatique du nirvana, ni se laisser emporter et dominer par le samsara. Il faut pratiquer la voie du milieu, c’est-à-dire équilibrer l’attachement et le détachement.
Pour ce faire, le moyen le plus radical, c’est le zazen, avec tout son corps et tout son esprit. Quand on pratique correctement la posture, on prend conscience de son souffle, de sa respiration, on se relâche vraiment et on trouve ce qu’on appelle le refuge. Vous savez, parfois dans la vie, on est épuisé, on ne sait plus comment se reposer. On n’arrive plus à dormir, on est anxieux, on est triste, et même, c’est écrit dans la Bible :
L’homme ne savait pas où reposer sa tête.
C’est vraiment cette question-là : comment se reposer, comment reposer sa tête, comment arrêter le mental ?
La première fois où je me suis assis en zazen dans un dojo, mon corps et mon esprit ont tout de suite compris que c’était cela. Vous vous asseyez profondément en zazen, bien droit, vous respirez calmement, vous lâchez tout. Quand le zazen est fini, vous vous sentez purifié, comme un nouveau-né prêt à voir la vie comme un enfant. Ensuite, vous vous confrontez à la vie, et quand vous êtes trop fatigué, vous recommencez zazen et vous équilibrez samsara et nirvana de cette manière.
C’est donc très précieux pour un être humain de connaître le zazen. Ce qui est très important, c’est le souffle, votre respiration, parce que dans le souffle lui-même, dans la respiration elle-même, intervient cette notion de nirvana et samsara. Prendre, lâcher. Les deux sont magnifiques et complémentaires l’un à l’autre.