Quel est le rapport entre zazen et le rien ?

quel est le rapport entre zazen et le rien
Mondo - questions à un maître zen
Quel est le rapport entre zazen et le rien ?
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Published: 21/09/2014 | Updated: 21/09/2024

Alors, il y a deux choses : d’abord, il ne faut pas parler de rien, du rien, puisque ce n’est pas la peine d’en parler. Effectivement, comme je disais tout à l’heure, c’est une expérience qui précède le langage ou va au-delà du langage. Mais en même temps, cela n’empêche pas d’utiliser le langage pour communiquer aussi.

On peut l’utiliser, mais il ne faut pas s’y attacher, parce que l’expérience elle-même… Il y a une phrase qui dit qu’un maître disait : « Moi, quand j’enseigne, je ne pratique pas, mais quand je pratique, je ne peux pas enseigner. » C’est la même chose. Moi, quand je suis en zazen, je ne peux pas parler. Mais quand j’enseigne, je sors de mon zazen et j’enseigne. Alors là, je ne peux pas dire que je pratique à 100 %, puisque je m’exprime à l’extérieur, etc. Mais c’est important de toucher les différents points de vue et les différentes zones du cerveau. La parole et l’enseignement sont très importants. C’est-à-dire que si on fait zazen sans rien dire, on finit par ressasser ses propres pensées, ses propres limites. Le fait qu’il y ait un enseignement permet justement de lâcher nos limites, d’aller plus loin et de réfléchir. Mais réfléchir dans le sens basique du terme, comme un miroir qui reflète et nous renvoie une information.

Grâce au langage, on peut exprimer à la fois le conscient et l’inconscient. De plus, pendant le zazen, la position de la tête est extrêmement importante pour le fonctionnement du cerveau. On ne met pas en mouvement le cortex, le néocortex, qui est un cerveau absolument admirable, mais dont on n’utilise qu’un petit pourcentage de ses possibilités. Ce n’est pas une critique du néocortex, qui fait de nous ce que nous sommes, c’est-à-dire peut-être l’être le plus évolué de la planète sous certains aspects. Mais pendant le zazen, on ne l’utilise pas. La posture est essentielle. Si on utilisait le néocortex, et spécialement le frontal, on serait davantage dans la posture du penseur de Rodin, par exemple. Il pense, il rêve, il rêvasse ou il se prend la tête sur un problème mathématique. Dès qu’on redresse sa posture, la conscience change immédiatement. C’est cela qu’il faut comprendre. Le fait de tendre la nuque éveille le cerveau reptilien, le cerveau primitif, qui, en général, s’affaiblit quand on a une mauvaise posture. Le cerveau primitif est un cerveau instinctif, presque animal, où l’odorat commence à se sensibiliser, ainsi que la peau. On devient à l’écoute du fonctionnement très sensible de nos cinq sens.

L’enseignement donné dans le dojo n’est pas perçu intellectuellement. Il est entendu et éveille des parties du cerveau plus profondes. Chacun se l’approprie, le prend et se le réapproprie. Souvent, d’ailleurs, après le zazen, moi-même je ne me souviens plus de ce que j’ai raconté. Les gens disent : « Non, je ne me souviens plus. J’ai écouté, ça me semblait bien, mais je ne me souviens plus de quoi ça parlait. » Ce n’est pas grave. Ce n’est pas un enseignement universitaire.