Published: 01/11/2014 | Updated: 18/11/2024
Le corps doit pouvoir être abandonné, relâché, tout en maintenant une position dynamique, une position d’éveil. C’est pour cette raison que l’on parle d’“éveil” : parce que l’on ne dort pas. Mais cela n’est possible que si la posture est correctement prise. D’où l’importance, au début, de fréquenter un dojo où l’on enseigne la posture adéquate et où l’on peut être corrigé pour suivre les indications avec précision.
La posture est essentielle, notamment la position du bassin, qui doit être basculé légèrement vers l’avant. Pour cela, il est conseillé aux débutants d’utiliser un coussin (zafu) suffisamment haut. En ajustant la posture, le dos devient droit, les poumons s’ouvrent et l’équilibre s’établit entre le sacrum, le périnée (posé sur le zafu) et les deux genoux. Cet équilibre tripode est la base de la posture correcte.
Cependant, tout le monde n’a pas la même morphologie. Au Japon, où les corps peuvent être plus raides, Maître Kodo Sawaki soulignait que “l’anus doit regarder le soleil”, une métaphore exagérée mais efficace pour rappeler l’importance de basculer le bassin vers l’avant. En Occident, certaines personnes ont une cambrure excessive au niveau des lombaires ; elles devraient alors utiliser un coussin plus bas pour corriger cette tendance.
La posture, bien au-delà de son aspect physique, influence profondément le mental. Comme le disait Maître Deshimaru, “la mécanique cérébrale de la pensée zen est liée à la posture”. Prenons l’exemple de la statue du Penseur de Rodin : sa position traduit une introspection différente de celle d’un Bouddha assis bien droit. En zazen, les pensées s’élèvent du subconscient, mais elles ne doivent pas être suivies. Elles se libèrent, comme des nuages traversant le ciel.
Ces pensées subconscientes, qui s’élèvent pendant le zazen, sont semblables à des racines à déraciner. L’enseignement bouddhiste, comme celui des agriculteurs, consiste à déraciner les mauvaises habitudes, les angoisses et les peurs, tout en renforçant et en protégeant ce qui est déjà enraciné de positif en nous. C’est un travail patient, semblable à celui que l’on réalise dans un jardin.
Maître Deshimaru racontait une anecdote révélatrice : un jour, durant une session de zazen, une grosse mouche tournait autour de lui. Dans les dojos japonais, il est interdit de bouger, même pour chasser une mouche. Il réalisa que, dans la vie quotidienne, il ne prêterait pas attention à une telle mouche. Mais assis immobile en zazen, cette mouche prenait une importance disproportionnée. Finalement, la fenêtre entrouverte permit à la mouche de s’échapper. À ce moment précis, il ressentit un éveil, une libération. Cet épisode lui fit comprendre que, comme la mouche, les pensées qui s’élèvent en zazen doivent simplement être observées, puis laissées passer.
En pratiquant ainsi, nous créons un espace en nous-mêmes, un endroit précieux pour déraciner les pensées parasites et cultiver la sérénité. Cette pratique est un outil fondamental pour clarifier et équilibrer notre esprit.