Pénétrer la Grande Terre

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Kusens de Maître Kosen
Pénétrer la Grande Terre
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Au-dessus du plexus solaire, il y a un petit creux entre les côtes. C’est là qu’on va placer la racine du pouce gauche. Ensuite, on recouvre le poing gauche avec la paume de la main droite. On essaie de garder les avant-bras bien horizontaux, les épaules relâchées.

Tout ça, c’est le point clé et les serrures pour ouvrir des portes. Tous les petits détails qu’on apprend en zazen, il faudrait y consacrer un livre avec marqué : tendez les genoux, poussez la terre avec le gros orteil, détendez les épaules. Tout ça, c’est des serrures, des mots magiques.

Pourtant, on nous dit que dans le véritable zazen, on abandonne toute pensée consciente. Et d’un autre côté, on nous dit qu’il faut se remémorer tous les points de la posture. Chaque fois qu’on fait zazen, il faut se remémorer les points de la posture : menton rentré, tendre la nuque, etc.. C’est contradictoire.

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C’est vaguement de ça que je voudrais vous parler en cette matinée – pas d’été encore, bien que les premiers arbres soient en fleurs.

Il faut réaliser également que nous sommes bien petits et bien peu de choses pour prétendre à la posture du Bouddha. Et pour comprendre aussi que la posture du Bouddha est immense. Elle inclut beaucoup d’estropiés, beaucoup de malheureux, beaucoup de gens qui ne connaissent pas leur corps et qui en souffrent.

Ça fait des années que je commente le Shinjinmei, mais je n’ai toujours pas fini. C’est tellement riche, il y a tellement tous les secrets de l’humanité dedans. Le Shinjinmei dit :

« Le minimum est identique au maximum. »

Nous devrions effacer les frontières, sachant que l’univers est fractal. Différences de lieu, différentes réalités, différents points de vue, différents concepts. En partant d’un même point, on peut envisager des différences gravitationnelles, différents espaces, différentes distances, différentes vitesses. Cependant, Maître Keizan dit dans son commentaire :

Si une seule fois nous pouvons observer ou ressentir le cosmos dans sa totalité, nous connecter à lui, nous pourrions cette fois-ci nommer cela « pénétrer la Grande Terre ».

Je rappelle que le cosmos est fractal. Fractal, ça veut dire que c’est infini et que tout s’enchevêtre à l’infini. La Grande Terre, ça n’appartient pas qu’au bouddhisme. Il y a beaucoup de religions qui croient à la Grande Terre, la nouvelle Terre. Tous les sages et tous les êtres ordinaires le réalisent quoi qu’il en soit, ou ne le réalisent pas. Ils vont dans la Grande Terre ou ils n’y vont pas.

D’un seul coup d’œil, nous pouvons saisir ou rejeter toute chose à toute vitesse. Nous pouvons être un Bouddha ou un animal, nous pouvons réaliser l’unité. Mais attention, ce pouvoir n’est pas celui des autres, il est le nôtre, dans le bon sens et dans le mauvais sens. Il est le nôtre, il n’est pas celui des autres. Ce n’est pas grâce aux autres, ce n’est pas à cause des autres.

Voilà pourquoi dès qu’il y a des doutes, de la peur, on ne peut plus rien obtenir. Plus rien ne se réalise. Si on demeure sur les différences, sur les erreurs, nous ne comprendrons plus les éléments qui nous font face. Nous perdrons cette intimité divine de ressentir que tout est amour et tout est lié à tout.