
Pensez à basculer la cinquième vertèbre lombaire. C’est la première vertèbre mobile au-dessus du sacrum. On pourrait écrire tout un livre sur cette vertèbre. J’y pense parce que ces derniers temps, j’ai eu des problèmes de posture. La posture devient difficile avec l’âge ou la fatigue.
Et je me suis rappelé l’enseignement de Sensei, l’enseignement qu’il nous avait fait quand on était débutants. Il insistait tout le temps pour qu’on bascule, qu’on hyper-bascule. Le mot « hyper » est important parce que c’était une hyper bascule du bassin. On en a parlé pendant 30 ans, de cette bascule du bassin.
D’autant plus que, selon les races, la posture est différente. Chacun doit adapter les grands traits de la posture à sa morphologie. Par exemple, les Africains n’ont pas tellement de facilité à cambrer le bassin. Les Japonais non plus : ils ont tendance à avoir le sacrum et le bassin un peu rigides. Par contre, les Occidentaux ont tendance à avoir une hyper bascule du bassin. Ils cambrent trop, ils ont des scolioses.
Toujours est-il que, dans la difficulté, dans la tourmente, assis sur son petit zafu, les mots de Sensei, l’enseignement de Sensei m’est revenu. Et aussi celui de Kodo Sawaki, qui disait : « Il faut que l’anus regarde la lune. » C’était pour bien nous transmettre, ce n’était pas méchant, c’était pour corriger la posture.
Quand vous ne vous sentez pas bien droit, alors dressez-vous sur vos ischions. Basculez la vertèbre lombaire, la cinquième lombaire, et redressez la posture à partir de là. Ce n’est pas dangereux. Maintenant, une fois qu’on a redressé son dos, il faut évidemment relâcher les tensions. Il ne faut pas rester tout le temps en hyper cambrure tendue. Pendant tout le zazen, on redresse sa posture, on corrige, et après, on lâche.
Le vrai zazen, c’est quand on lâche. Par rapport à n’importe quoi. Le zazen se manifeste quand on lâche. Donc, comme on lâche, on ne s’en rend pas compte, mais le zazen se manifeste. On ne fait pas zazen.
Je réalise que ça me fait très plaisir, mais quand je lis les explications sur la méditation, je me rends vraiment compte que l’enseignement du vrai zen, transmis par Maître Deshimaru, qui vient des patriarches jusqu’au Bouddha, et la pratique authentique, les gens ne la connaissent pas. Même s’ils la connaissaient, ils ne pourraient pas comprendre.
Beaucoup de gens croient que les conditions du zazen, c’est être en pleine conscience. Pas du tout. Ça ne sert pas à être en pleine conscience tout le temps. Inconsciemment, naturellement, automatiquement, c’est son mantra.
Quand je veux faire des kusens, il faut vraiment que je me concentre parce que ma pensée s’échappe.
Les postures sont bonnes, mais il faut tendre la colonne de temps en temps, il faut pousser la terre de temps en temps, il faut basculer le bassin de temps en temps, il faut étirer la nuque de temps en temps, il faut rentrer le menton de temps en temps. C’est le petit plus.
On ne se bat pas pour gagner. On se bat pour remercier d’avoir un corps. L’usage qui est fait du zazen ne nous regarde pas. Nous, on fait le zazen. L’usage qui en est fait ne nous regarde pas. Il est total. L’effet du zazen est total. Il couvre les trois temps, c’est-à-dire passé, présent, futur, les dix directions, l’infiniment petit, l’infiniment grand.
On ne peut pas faire un peu de zazen. On ne peut pas faire un petit bout de zazen. « Je vais me faire un peu de bien. Je vais aller dans la pleine conscience. » Non, le zazen, c’est tout l’univers. C’est vrai que tout l’univers est relié et fractal, c’est-à-dire que rien n’est séparable.
On ne peut pas dire après zazen : « Tiens, j’ai pigé quelque chose, là. » Par contre, Sensei disait : « grands mérites ». On ne peut pas obtenir quelque chose, mais il y a un grand mérite. Ceux qui font zazen ont un grand mérite. Même s’ils ne le comprennent pas, ça ne change rien. Pas besoin de le comprendre.
Même si vous avez une mauvaise posture, elle est bonne quand même. Le Bouddha, il prend. Un grand mérite.
Il semblerait que le zazen soit un peu long. Je ne m’en rends plus compte.
Kaijo.