
J’avais lu l’autre jour une phrase tirée du Shinjinmei :
Illuminer sa propre intériorité s’opère par la lumière du vide et ne nécessite pas l’usage de la puissance de l’esprit.
C’est une phrase de Maître Sozan dans le Shinjinmei. On se pose la question même après de nombreuses années de pratique. On est tenté de chercher quelque chose d’extraordinaire ou de spécial. Parfois, on est fatigué. On aimerait trouver une illumination spéciale. Justement, Sozan réfute l’importance de cette illumination spéciale.
Il dit que cette illumination s’opère par la lumière du vide, donc malgré nous, au-delà de nous. Par la lumière fondamentale, à côté de quoi notre puissance personnelle est anecdotique, pas efficace.
Maître Kodo Sawaki disait toujours que ces phrases étaient en elles-mêmes de grandes conférences. Avec une phrase, il pouvait écrire un livre.
Parfois, quelqu’un lui demandait :
« Maître, quand je fais zazen, qu’en est-il de mon profit ? Qu’est-ce que je gagne ? Quel progrès est-ce que je fais ? »
Sawaki répondait toujours très rapidement :
Rien.
Cette réponse était véritablement juste. Et la plupart des gens étaient surpris. Rien. Ils font zazen toute la journée, et rien. Alors, certains préféraient partir. D’autres pensaient : « Rien… Oh, c’est intéressant, c’est profond. Je dois absolument faire zazen pour le rien. »
Mais leur « rien » était encore une grande chose, quelque chose de grand. Si nous désirons un tant soit peu obtenir un objectif, nous ne pourrons l’atteindre.
Quand on pratique zazen, ça change la totalité. Ça ne change pas quelque chose, ça change la totalité. Même avant notre naissance, ça change. Donc, on ne peut pas en avoir conscience. On ne peut pas l’attraper.
C’est pour ça que ce qui caractérise spécialement le zen soto, c’est-à-dire notre lignée, c’est que nous devons être sans but. La vérité du zazen est plus haute : sans but, sans limite, infinie. On l’appelle mushotoku.
- Mu : la négation.
- Shotoku : obtenir.
À quoi ça sert, le zazen ?
Mushotoku : ne rien obtenir.
Même Maître Eno le disait. Le sixième patriarche disait :
« Si nous demeurons sur un objet, sur quelque chose, on ne peut pas obtenir l’esprit véritable. Il faut vraiment tout lâcher. »
D’où la phrase de Sozan :
La véritable illumination s’opère par la lumière du vide et ne nécessite pas l’usage de la puissance de l’esprit.
Même pas besoin d’utiliser l’esprit.