Published: 15/01/2015 | Updated: 18/11/2024
J’ai coutume de commenter ou de lire, de temps en temps, une phrase du Shin Jin Mei. Le Shin Jin Mei est le plus grand et le plus ancien poème zen chinois, porteur des enseignements universels les plus anciens. Ces enseignements, parce qu’ils sont universels, restent toujours d’actualité et correspondent à la réalité, même à notre époque où l’information abonde et où les contradictions sont omniprésentes. Comprendre cette universalité est essentiel.
La phrase en question est :
L’homme sage est non actif,
L’homme stupide aime et s’entrave lui-même.
L’homme stupide s’enchaîne à la haine et aux six souillures. Cela signifie : ne pas trop regarder, ne pas trop écouter, ne pas trop sentir, ne pas trop parler, ne pas trop manger, ne pas trop toucher, et ne pas trop construire mentalement. Le “trop” est une erreur, mais la peur également. Il n’est pas nécessaire de fuir ni d’avoir peur, tout comme il n’est pas nécessaire de chercher des complications. Courir après quelque chose ou fuir sont deux attitudes erronées.
Dans notre pratique zen, l’éveil, ou satori, consiste simplement à être dans des conditions normales. La haine et la peur conduisent à l’ascétisme, mais dans le zen bouddhisme authentique, il n’est pas question de se mortifier, d’être fanatique ou de tomber dans des interdictions rigides. Ce n’est ni “il faut faire ça” ni “il ne faut pas faire ça”.
Ainsi, “l’homme sage est non-actif”. Il ne s’attache ni ne s’enchaîne lui-même. Il comprend que les forces cosmiques sont multiples et relatives. C’est pourquoi il garde le silence, ne prend pas parti et observe tous les aspects d’une vérité.
Dans la médecine chinoise traditionnelle, que j’ai étudiée il y a une vingtaine d’années, cette approche est similaire : il faut observer tous les aspects d’un moment donné. Certains aspects prennent la priorité, mais cela ne signifie pas qu’ils sont des vérités absolues. La vérité se renouvelle à chaque instant, qu’elle soit cosmique ou divine.
Les informations contradictoires nous rappellent qu’il n’est pas toujours possible de prendre parti. Il y a des moments où parler ou agir est une erreur, tout comme il y a des moments où le silence et l’inaction le sont. Le zen nous enseigne à nous recentrer, à nous situer par rapport aux forces cosmiques fondamentales, dans un silence qui transcende les idées. Cela se fait directement avec le corps, et de là naissent automatiquement la sagesse, le calme et la tranquillité.