Le comportement juste

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Kusens de Maître Kosen
Le comportement juste
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La main gauche est au-dessus de la main droite. Cette posture des mains a été transmise de maître à disciple jusqu’à aujourd’hui. Tout simplement, parce que l’énergie Yang monte à gauche du corps. Le côté gauche du corps est Yang et le yang est contenu par le Yin.

L’énergie du rein Yang, du foie, monte jusqu’en haut du corps, vers le cœur. Ensuite, l’énergie Yin redescend par les poumons, la rate, puis le rein. Ça tourne en montant par la gauche, en descendant par la droite. Donc, la main gauche repose dans la main droite.

Une autre chose que je voudrais enseigner aux moines qui pratiquent dans ce dojo, c’est qu’il y a deux types de moines : zusan et nin-niku. Mon maître Deshimaru disait que, en général, le zen rinzaï était zusan, et le zen Soto, nin-niku.

Zusan

Zusan est un comportement trop libre. On sait que dans le rinzaï, ils se donnaient des coups, des coups de bâton, des coups de poing, ils poussaient des cris. C’était très théâtral. On appelle ça zusan, désordonné, un peu fou. Des kôans, on se casse la tête, on essaie de résoudre des énigmes, etc.

Nin-niku

Alors que le zen soto nin-niku est beaucoup plus raffiné. On est relativement silencieux et on évite trop d’artifices. On évite évidemment le mauvais comportement et la violence.

Souvent, les moines zen sont pauvres, ils ont peu de vêtements et vivent très humblement. Mais, nous expliquait Sensei, bien qu’ils soient très pauvres, ils ont beaucoup de délicatesse nin-niku. Même si la robe est vieille, usée, elle doit être propre.

soji ji

Quand on va au dojo, même si on ne doit pas sentir le parfum c’est important d’être propre et, même si son kimono est vieux, de le garder propre, de le laver régulièrement. Le premier enseignement qu’il nous avait donné, on avait 18 ans, on était plutôt tendance hippie, on voyageait en stop, on vendait de l’artisanat pour pouvoir avoir un peu d’argent, la première chose qu’il nous avait expliqué, c’est que les moines zen, c’est comme les hippies, sauf qu’ils sont propres et délicats.

Par exemple, quand ils s’assoient par terre, ils déplient leur zagu, la petite toile qu’on déplie pour se prosterner. Ça fait partie de la panoplie de la délicatesse du moine zen.

Je n’ai jamais oublié cet enseignement, parce que ça nous faisait plaisir de dire que les hippies étaient proches des moines zen.

Zanshin

Pour la cérémonie, les sempaï, passer un bâton d’encens, quand on va chercher ou qu’on donne le kyosaku, là aussi apparaît zanshin. Non, zanshin c’est encore autre chose, je me mélange les mots en japonais. Pour zanshin, l’exemple que nous donnait Sensei, c’étaient les samouraïs. Quand on condamnait quelqu’un à avoir la tête coupée, un bon samouraï devait couper la tête, mais pas complètement. Il devait laisser un petit bout de peau pour éviter que la tête ne tombe par terre. Ça s’appelle zanshin. Le reste de la concentration.

Quand on fait la cérémonie du Kyosaku, on ne doit jamais aller directement vers le centre. Quand on va saluer l’autel, on va un peu de côté, on fait deux petits pas jusqu’au centre. Ça s’appelle zanshin, l’esprit qui demeure, la concentration qui demeure, même après l’action. Dans la cérémonie, il ne faut pas faire de manières, ce n’est pas la peine d’être sophistiqué. Dans le soto zen, il y a beaucoup de sophistication.

Cérémonies

De plus, la cérémonie varie selon les temples. Vous allez dans un temple, ils vont vous enseigner comme ceci. Vous allez dans un autre temple, ils vont vous enseigner comme cela. Il faut garder l’essence, l’esprit, la délicatesse et la concentration. Mais ce n’est pas la peine de faire des manières. Le temple qui a le plus développé les cérémonies, c’est le temple de Sōji-ji, près de Tokyo. C’est carrément de la danse, de la chorégraphie. Elles sont différentes de celles de Eihei-ji, qui sont plus simples.

Ce qui les intéresse le plus les gens qui ne connaissent pas le zen, les journalistes par exemple, ce sont les cérémonies. Ils disent tout le temps : « Moi ce qui m’intéresse, c’est les cérémonies, je peux filmer la cérémonie ? » Sensei répondait : « La vraie cérémonie zen, c’est le zazen ». C’est dur de garder le juste milieu. Moi, je suis un peu zusan, peut-être pas assez délicat. Il faut toujours garder une certaine vigilance. C’est comme dans le zazen : ni être trop tendu, ni trop endormi.