Published: 22/11/2014 | Updated: 15/11/2024
Je continue le Shinjinmei. Les 37ᵉ et 38ᵉ poèmes
“Si nous haïssons les six souillures, nous ne pouvons atteindre l’état de véritable Bouddha.” Voilà la phrase. Mais qu’entend-on par les six souillures ?
Les six souillures, c’est la perception que nous avons de nous-mêmes. C’est aussi l’acceptation de notre corps et de nos cinq sens. En fait, six : la vue, l’ouïe, l’odorat, le goût, le toucher et la conscience.
Beaucoup de personnes, lorsqu’elles parlent de méditation, l’imaginent accompagnée d’une petite musique lancinante, un peu New-Age, dans un fauteuil, les yeux fermés. Elles essaient de se sentir bien, de créer une ambiance cotonneuse, d’oublier leur corps et leurs soucis. Elles se concentrent éventuellement sur des images agréables : un lac, un arbre, un endroit idyllique.
Dans le zazen, au contraire, on met en premier plan ce que nous sommes : notre entité, notre corps, nos pensées. On l’assume. Ce corps, ce “fardeau”, d’une certaine manière. On ne contrôle pas forcément ses pensées, qui peuvent être bonnes ou mauvaises, ni son corps, qui peut être en mauvaise santé ou mal à l’aise. Pour un débutant, cela peut sembler difficile et douloureux. Pourtant, dans le zazen, le corps est primordial. Il doit participer à 100
En ce moment, je médite sur la question du bien et du mal. L’enseignement du Bouddha à ce sujet est profond et fascinant. Même après 40 ans de pratique, je continue d’approfondir ce thème fondamental : “Qu’est-ce que le bien ? Qu’est-ce que le mal ?”
Dans le zen, on n’enseigne pas à rechercher un grand éveil ou une illumination extraordinaire. Le bien, c’est l’équilibre, l’harmonie, et la participation au mouvement cosmique fondamental. Si l’homme prétend faire “le bien”, il crée souvent des problèmes qui traumatisent l’humanité depuis des millénaires.
Le zen enseigne que l’obscurité et la lumière sont interdépendantes. Dans certains soutras, on lit : “Un pas en avant dépend d’un pas en arrière.” Un poème dit aussi : “À minuit, la vraie lumière. L’aube n’est pas claire.” Pourquoi discriminer le clair de l’obscur, le bien du mal ?
Et pourtant, l’enseignement fondamental du Bouddha reste d’“éviter le mal et pratiquer le bien”. Lorsqu’on approfondit et qu’on pratique cela avec le corps, on découvre une richesse inestimable.
Dans le zazen, la posture du Bouddha se pratique avec notre corps, notre matérialité, et nos imperfections. Malgré tout, il faut corriger la posture tout en l’acceptant. Voici les points importants :
– La tête doit être droite, le menton légèrement rentré, la nuque tendue. – Les épaules doivent être relâchées, la colonne bien droite, le bassin basculé. – Les genoux doivent être fermement ancrés au sol. Poussez la terre avec les genoux et le ciel avec la tête. – Les mains doivent former un mudra : les pouces en contact subtil, les mains posées contre l’abdomen, les coudes légèrement écartés. – Respirez par le nez, la bouche fermée, la langue contre le palais. – Les yeux restent entrouverts, avec un regard posé à un mètre devant soi, à 45 degrés vers le sol, sans fixer ni se focaliser sur quoi que ce soit.
Le maître Dôgen explique que pratiquer le bien, c’est mettre en repos les six sens, retrouver l’équilibre et l’harmonie avec l’ordre cosmique. Simplement cela : équilibre, harmonie.
Cette dynamique du zazen offre des réponses aux problèmes écologiques et humains. Vouloir forcer les choses, prétendre faire mieux que les autres, ne crée que des problèmes. Le bien, dans le zen, c’est suivre l’équilibre et l’harmonie avec l’ordre cosmique.