Published: 06/12/2014 | Updated: 16/11/2024
“La pensée du zen”, ou “la pensée du zazen”, est avant tout physiologique : c’est une pensée du corps. Elle ne se limite pas à une réflexion philosophique ou spirituelle abstraite. Pratiquer zazen engage le corps dans son entièreté, de façon intense et totale, comparable à un accouchement ou à une profonde transformation intérieure.
Les maîtres zen parlent de “se dépouiller du corps et de l’esprit”. Cette pratique engage directement notre matérialité, nos entrailles, et notre souffle. Elle nécessite une posture rigoureuse et une respiration maîtrisée. Voici les principes fondamentaux de la posture et de la respiration dans le zazen :
- La tête doit être droite, le menton légèrement rentré, et la nuque tendue.
- Les épaules doivent être relâchées, la colonne bien droite, et le bassin basculé.
- Les genoux doivent être fermement ancrés au sol : poussez la terre avec les genoux et le ciel avec la tête.
- La respiration doit être lente et profonde, en pressant doucement les intestins vers le bas pendant l’expiration.
- À la fin de l’expiration, sentez votre corps s’ancrer dans la terre ; laissez l’air frais vous remplir naturellement.
Cette pratique permet de nettoyer les résidus d’angoisse, de pensées, et d’anxiété. Une fois l’expiration complète, l’air frais qui entre renouvelle non seulement le souffle, mais aussi l’esprit. Comme l’enseignent les maîtres zen : “Inspirez du vide, laissez naître un esprit frais et silencieux.”
Une célèbre histoire zen illustre cette notion. Un disciple demande à un maître pourquoi et comment pratiquer. Le maître, en silence, lui offre du thé, mais continue de remplir la tasse jusqu’à ce qu’elle déborde. Le disciple s’exclame : “Maître, arrêtez ! La tasse déborde !” Et le maître répond : “Ton esprit est comme cette tasse : déjà plein, il ne peut recevoir aucun nouvel enseignement.” Ainsi, pour comprendre et recevoir le zen, il est essentiel de vider son esprit et son souffle.
Dans le bouddhisme, les préceptes fondamentaux — comme “ne pas tuer” — doivent être compris au-delà de leur sens littéral. Comme l’explique Maître Keizan : “Il ne s’agit pas de ne pas tuer physiquement, car on ne peut tuer la vie. Il s’agit de ne pas tuer le Bouddha qui est en nous.” En ce sens, la pratique du zazen est une question de vie et de mort pour l’éveil intérieur.
Si nous négligeons cette pratique, nous risquons de perdre notre connexion au Bouddha intérieur, comme une personne qui refuse d’accoucher ou d’aller aux toilettes finirait par mourir de cette rétention.
Pratiquer le zazen va au-delà de toute religion ou philosophie. C’est une nécessité humaine, une pratique d’équilibre et d’harmonie intégrée dans la vie quotidienne. Comme l’affirme le texte : “Notre monde n’a pas besoin d’argent, mais de zazen.” À travers cette discipline, nous retrouvons un lien essentiel avec nous-mêmes et l’univers.
La pratique du zazen est une opportunité pour sauver l’humanité de son désarroi et pour renouer avec la chance unique que nous avons de vivre sur cette terre.