Mondo du 9 juin 2012 – 1re partie

Mondo - questions à un maître zen
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Mondo du 9 juin 2012 - 1re partie
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Maître Kosen : : Rien n’aurait pu me faire douter. Mais bien plus tard, j’ai eu des discussions profondes avec mon père.
Et là, je me suis aperçu qu’il avait une dimension incroyable et qu’il comprenait.
J’étais stupéfait de découvrir que mon père comprenait des choses que je croyais être des secrets profonds.

Une fois, je revenais d’un camp d’été. J’étais avec ma mère, et nous sommes allés rendre visite à mon père.
On s’est mis à discuter, à boire un verre et même à fumer quelques joints avec lui.
Ma mère n’arrivait pas à suivre nos conversations. Elle disait :
« Je ne comprends rien à ce que vous racontez, vous me faites flipper ! »

Moi, je venais du camp d’été, donc j’étais plutôt gonflé à bloc.
Mon père, qui était très intelligent, adorait me titiller et essayait de démonter tout ce que je disais.
À un moment, il me demande :
« C’est quoi, ton truc, là, le zazen ? »

Mon père avait une hanche raide à cause d’un accident, il ne pouvait pas prendre la posture. Il disait :
« Alors, parce que je ne peux pas m’asseoir comme ça, je suis une merde ? Ton truc, c’est réservé à une élite ? »

On discutait, et je lui ai dit que le zazen, c’est actualiser la divinité en soi. Il m’a répondu :
« Alors quoi, tu te prends pour Dieu ? »
Je lui ai dit : « Oui. »
Il éclate de rire et lance : « Ah ouais, tu te prends pour Dieu ? Alors mon vieux, t’es un sacré salopard ! »

À la fin, il me regarde et dit :
« De toute façon, même si t’es Dieu, moi, je suis le Père de Dieu. »

C’était ce genre de discussions. C’est là que j’ai réalisé que les générations avant nous avaient aussi des éveils, des expériences spirituelles profondes.

Maître Kosen : Oui, c’est une perspective intéressante. On peut même penser que, dans un sens, on choisit ses parents avant de naître. Ce choix est essentiel.
On choisit sa naissance en fonction de ce qu’on a vécu avant. Par exemple, quelqu’un qui est mort dans une guerre pourrait renaître dans un environnement paisible, loin des conflits.

Moi, je suis né en 1950, peu après la Seconde Guerre mondiale. J’ai eu une vie sans guerre. Plus on évolue spirituellement, plus on est capable de faire ces choix consciemment.

Entre la mort et la renaissance, il y a un moment crucial. Si notre esprit est dominé par les peurs et les illusions, on ne contrôle rien. On se réincarne dans des situations dictées par la nécessité, par la peur, et on perd cette capacité de choisir librement.

Mais avec une pratique comme le zazen, on peut transcender cela. On peut atteindre un endroit de repos entre les existences, où on réfléchit et prépare consciemment sa prochaine vie.

Question : : Et quelle est votre technique personnelle pour rester centré dans la pratique ?

Maître Kosen : La technique recommandée par Maître Dôgen, c’est de pratiquer comme si on avait le feu dans les cheveux ! Imagine que quelqu’un t’allume les cheveux… Tu réagirais tout de suite, non ?

Quand j’ai commencé, c’était ça pour moi. J’avais « le feu partout ». Ma vie était entièrement consacrée à la pratique.
Mais chacun trouve sa propre intensité.

Maître Dôgen parle de l’importance du bodai-shin, l’esprit de la Voie. Cela vient de la prise de conscience de l’impermanence. La vie passe si vite ! Si on ne saisit pas l’opportunité d’évoluer maintenant, on devra y faire face, tôt ou tard, même après la mort.

C’est pourquoi il faut s’investir pleinement dans la pratique dès maintenant, sans perdre de temps.

Maître Kosen : Une autre chose importante : il faut respecter les animaux. Ils ont des émotions, des pensées, une sensibilité. Maltraiter un être vivant, c’est ignorer l’interconnexion entre tous les êtres.

Dans l’histoire, nos choix étaient souvent limités : aller à la guerre ou accepter un mariage arrangé. Aujourd’hui, nous avons plus de liberté, mais cette liberté vient avec une responsabilité.

En prenant conscience de notre histoire, de nos conditionnements et de nos illusions, nous pouvons évoluer spirituellement et contribuer à un monde meilleur.

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