Published: 16/01/2021 | Updated: 31/05/2024
Je dédie ce zazen et l’Hannya shingyo que l’on chantera tout à l’heure à un ancien ami de la voie, de la pratique, qui s’appelait Robert Livingston. Un disciple américain fort sympathique de Maître Deshimaru qui vivait à Paris et qui, après le décès de Maître Deshimaru, a construit un temple à La Nouvelle-Orléans.
Il faisait partie de tous ces amis internationaux qui gravitaient autour du dojo de la rue Pernety. Il avait fait comme samu d’enregistrer beaucoup de kusens de Maître Deshimaru sur cassette. Il a eu la gentillesse de me donner toutes ses cassettes et on les a transcrites. Je pense qu’elles doivent être sur le site web.
C’est quand même assez intéressant de pouvoir entendre les enseignements de Maître Deshimaru en direct, surtout le son de sa voix. En fait, Sensei, ce n’était pas forcément important d’écouter ses paroles, mais simplement le son de sa voix. C’est un enseignement très fort, la manière dont il respirait, dont il parlait, avec une voix qui venait du ventre. C’était tout à fait particulier à lui.
J’espère qu’on remettra ça, et si elles n’y sont pas, qu’on mettra ces enregistrements des kusens de Maître Deshimaru sur le site, parce que c’est quelque chose qui donne beaucoup de valeur au site, parce qu’il n’y a ça sur aucune autre plateforme. Évidemment, c’est de l’audio. Maintenant, on est habitué à l’image et à regarder des vidéos, mais on peut toujours l’illustrer par des vidéos.
Maître Wanshi
J’ai décidé que le samedi, pour les gens qui viennent le samedi, je réciterai quelques lignes d’un enseignement de Maître Wanshi. C’est un grand modèle pour Maître Nyojô, qui était lui-même le maître de maître Dôgen qui a transmis le zen de Chine au Japon.
Donc, pour Maître Nyojô, l’exemple de Maître Wanshi était marquant, il a été beaucoup marqué. C’est un très grand maître, Maître Wanshi, qui a écrit des textes d’une grande profondeur et d’une grande utilité pour les pratiquants qui s’intéressent vraiment au zazen. Il écrivait ça sous forme de poèmes très simples qui donnaient des indications, spécialement sur l’état d’esprit. Je vous ai parlé de la posture tout à l’heure.
Maître Deshimaru disait :
« La posture, c’est le plus important. Only posture! ».
Souvent, il passait derrière avec son kyosaku et quand on n’avait pas la bonne concentration, il nous donnait un coup, mais ça faisait du bruit.
Maître Wanshi disait : « Vous devez purifier, guérir, moudre », il parle du mental, « purifier, guérir, moudre ».
On a tendance à tourner sans arrêt des pensées dans sa tête. Si on corrige sa posture, spécialement la posture de la tête, on calme la pensée mentale. Normalement, on ne doit pas suivre la pensée mentale.
Mais le véritable enseignement authentique de la pratique du zazen ne dit pas qu’il faut arrêter de penser. Parce qu’arrêter de penser, c’est encore penser. Si on se bat contre son mental, on le renforce.
Il est dit : « Il faut laisser passer, laisser passer ». C’était vraiment un des grands enseignements de Maître Deshimaru : « laisser passer ». J’avais un groupe de rock quand j’étais jeune, que j’avais appelé Laisser passer. D’ailleurs, ils m’ont laissé passer.
Purifier, laisser passer guérir, laisser passer, moudre, laisser passer. Moudre dans le sens d’écarter toutes les tendances qu’on a fabriquées et transformées en habitude. Parce que si on ne laisse pas passer le mental, il se renforce et se calcifie. Il se transforme en habitude, même dans le zen. Il ne faut pas que la pratique devienne une habitude.
C’est difficile, parce que l’on n’a pas un corps parfait, on vieillit. Malheureusement, quand on devient vraiment trop dans l’habitude, on meurt comme un vieil arbre sec qui ne donnera plus de bourgeons pour l’année prochaine. Donc, il faut toujours renouveler sa pratique, redécouvrir encore le zazen comme un débutant.
Le mental n’existe pas
Finalement, le mental n’existe pas. Le mental, c’est ce qui nous fait croire qu’on a un ego, ce qui nous fait renforcer notre foi dans notre ego. Si on stagne, si on renforce sa foi dans l’ego, ça devient une habitude, ça se rigidifie. Mais si on laisse passer en zazen, l’esprit devient calme et il prend de l’espace. Il devient silencieux. Alors, vous pourrez résider à l’intérieur d’un cercle clair et radieux.
On représente souvent le Bouddha avec une aura, qui apparaît comme un cercle derrière lui, comme on le voit en deux dimensions. On pense que c’est un cercle, mais en fait c’est une bulle. Une bulle, c’est non seulement un espace d’énergie qui nous entoure, mais une bulle contient tout le cosmos, notre conscience. On a l’impression que tout le cosmos, toutes les existences, tout ce qui existe, tout l’univers est une bulle. Mais cette bulle, elle est tout le temps dans les illustrations, surtout tibétaines ou indiennes, ou même japonaises ou chinoises. On représente les grands saints ou les grands bouddhas entourés d’une grosse bulle de couleur or. Chacun a sa couleur.
Fréquence du vide
Vous savez qu’il y a sept couleurs de l’arc-en-ciel, ça dépend de la fréquence. Par exemple, nous sommes dans la fréquence hertzienne, notre réalité. La physique, ce qu’on appelle la réalité, c’est le hertzien. Entre les basses et les hautes fréquences hertziennes, il y a une marge vibrationnelle qui change beaucoup de choses. Si on est dans les basses fréquences hertziennes, c’est très pesant. Au-dessus du hertzien, il y a l’infrarouge. Tout ça, c’est une question de fréquence.
La matière, c’est du vide à une certaine fréquence, plus épaisse, plus lente. Après, il y a l’infrarouge, l’ultraviolet, la lumière, etc. Je ne les connais pas par cœur. Gamma, bêta, rayons X, lumière infinie. Ce sont des spectres qui ont chacun leur couleur.
Cette bulle, cette aura, qui est autour des gens qui font zazen, varie selon la fréquence vibratoire de la personne qui médite. Nous, on aura une aura marron. Vous pourrez résider à l’intérieur d’un cercle clair et radieux, et non pas rempli de pensées obscures, d’angoisse, de peur, ou de colère. Mais un cercle de plus en plus clair.
C’est comme pour le Covid : il faut souvent aérer la maison. Se laver les mains fréquemment au savon de Marseille, c’est parfait. Et aérer sa maison régulièrement, un courant d’air toutes les deux ou trois minutes et deux ou trois minutes d’aération toutes les trois heures. Là, c’est pareil. Le cercle est clair et radieux.
Cette vacuité absolue n’inclut aucune image. Ça veut dire que non seulement, on ne suit pas ses pensées, mais on n’entretient pas non plus les images. L’indépendance véritable ne repose sur aucune chose.
Méditation sans objet
Souvent, il y a des gens qui font des méditations guidées. Ils n’arrêtent pas de se concentrer sur des images : « Alors vous imaginez que vous êtes à côté d’un grand lac et là, il y a le coucher du soleil. Et vous sentez le calme du lac, l’eau qui ne bouge pas, qui ne fait aucun bruit. Et vous vous sentez relâché ».
Bon, je ne suis pas très doué pour faire ce genre d’enseignement. Mais l’indépendance véritable ne repose sur aucune chose. Faites grandir et illuminer la vérité originelle.
Quand on va mourir, beaucoup de gens se demandent : « Est-ce que je vais me réincarner ? Dans quel endroit je vais me trouver ? » Il n’y en a pas un qui pense : « Quand je serai mort, je n’existerai plus, il n’y aura plus rien ».
J’ai eu une opération grave et avant de m’endormir, j’ai eu la sensation que je n’allais plus exister du tout. « Rien », ce n’est même pas quelque chose.
La vacuité absolue n’inclut aucune image. L’indépendance véritable ne repose sur aucune chose. Et c’est cet « aucune chose » qui contient tout. Il n’y a plus d’ego, d’histoire personnelle, de souvenirs, de famille, d’amour, à part l’amour universel, il n’y a plus de conscience, même pas conscience de « je suis ». C’est cet endroit où il n’y a rien, mais où tout est présent.
C’est justement parce qu’il n’y a rien que tout est présent. Il n’y a rien qui manque. Et tout d’un coup, apparaît la lumière, comme on raconte dans la Bible : « Fiat Lux ». Le Big bang. Tout d’un coup, la lumière apparaît. La création de toute chose apparaît.
Vérité originelle
Donc, faites grandir et illuminer la vérité originelle, sans vous préoccuper des conditions extérieures. Évidemment, il n’y a pas de conditions extérieures.
Mais la vérité originelle, c’est une pulsion, c’est une énergie, une soif de vie, de créativité. C’est le yang.
« De même, il nous est dit de réaliser que rien n’existait vraiment. Mais dans ce champ, la naissance et la mort n’apparaissent pas. »
Donc, Maître Wanshi parle du zazen, de la profondeur de sa pratique, où il est au-delà de la vie et de la mort, dans ce qu’on appelle dans le bouddhisme le nirvana, cet endroit où il n’y a rien, mais où toute chose existe. Donc c’est poétique. Il nous enseigne :
« Il nous est dit de réaliser que rien n’existe vraiment, mais dans ce champ, dans le vrai zazen, la naissance et la mort n’apparaissent même pas. »