Published: 08/02/2020 | Updated: 23/05/2024
Je voulais vous lire un enseignement donné par maître Dogen lorsqu’il est revenu au Japon après un long voyage en Chine, où il a connu son maître et reçu la transmission du Dharma. Il est revenu au Japon et c’est à peu près son premier échange avec le public japonais, si je puis dire, et les premiers enseignements à des débutants japonais.
Arrêtez de bouger. Ne regardez pas les autres, ce n’est pas la peine de regarder ailleurs. Précisément, c’est l’un des points importants des postures du Bouddha – parce que vous allez voir qu’il y en a plusieurs.
Évidemment, à cette époque, le bouddhisme existait déjà beaucoup en Chine, en Inde, au Japon. Il y avait déjà beaucoup de temples et de sectes chinoises qui avaient enseigné le bouddhisme au Japon. Mais le vrai zen traditionnel n’existait pas encore réellement, et maître Dogen se faisait fort de le faire connaître. Il leur explique :
« Le zen est un enseignement traditionnel communiqué oralement de maître à disciple à travers la pratique. »
Comme on fait maintenant oralement, à travers la pratique, en expliquant la pratique et en en faisant l’expérience.
« Il s’est transmis depuis le Bouddha historique Shakyamuni sans interruption jusqu’à aujourd’hui. »
La tradition, la posture, la manière de pratiquer ont été transmises entre chaque maître et chaque disciple. Et ça continue encore aujourd’hui sans interruption. On a toute la liste des maîtres qui nous ont précédés jusqu’à Shakyamuni Bouddha.
Après la mort de Shakyamuni, Bouddha, beaucoup de formes de bouddhisme se sont écartées de son essence. Les pratiquants ont perdu l’esprit initial sans s’en rendre compte. Bien qu’étudiant profondément des textes des sutras, que pratiquant de nombreuses cérémonies, des prières, ils n’arrivaient pas à atteindre la vérité et à se libérer véritablement.
Dans le zen authentique, dit Dogen, on récite des prières au Bouddha ou on apprend les sutras, mais ce n’est pas l’essentiel. On le fait en quantité raisonnable, mais ce n’est pas l’essentiel. Le plus important est de se libérer de son ego par le zazen et de trouver dans cette posture un état de grande liberté intérieure.
Vous vous concentrez sur la posture, vous la pratiquez telle qu’elle est expliquée, vous faites un effort, vous vous positionnez correctement, vous placez le regard à l’intérieur, vous arrêtez de regarder tout autour de vous pour rentrer dans le monde subjectif du zazen et rapidement, vous en tirez un état de grande liberté intérieure.
Dogen dit :
« Pratiquer le zazen, c’est prendre l’attitude physique et mentale d’un Bouddha. Tout le monde peut le faire et quand vous le réalisez en vous, avec votre propre corps, l’univers entier devient enseignement. Alors l’esprit s’éveille. »
Il y a un rapport très fort entre la posture, la pratique de la posture et l’état d’esprit, la conscience. La méditation, ce n’est pas seulement le cerveau, mais c’est le corps tout entier. On pense même avec ses pouces, avec ses genoux, son dos, son souffle, sa respiration aussi.
Dogen continue :
« Tous les maîtres jusqu’à aujourd’hui ont eu la même profonde admiration pour le zazen, car il est dit que même si une seule personne le pratique, toutes les existences de l’univers en reçoivent les bienfaits. »
Au moment même où nous le mettons en pratique, où on s’assoit en zazen, la terre, les arbres, les monuments, les murs de pierre, tout devient zazen et on en reçoit l’influence. Atteindre l’éveil, c’est couper la racine de nos pensées, de nos connaissances et de notre dogmatisme (et aussi couper son portable !).
Tous ceux qui pratiquent reçoivent les bienfaits du zazen et peuvent pénétrer la chose réelle, grâce à l’aide de l’esprit libre et illuminé du Bouddha. Quoi qu’il en soit, vous devez pratiquer comme il est enseigné, sans but, sans conscience personnelle, tranquillement et sans distinguer l’éveil de la pratique elle-même. Car la pratique de zazen elle-même est l’éveil.