– On est quand même façonnés par zazen, ça s’ancre en nous, ce n’est pas seulement physique, mais également ?
– Oui, c’est pour cela que l’on fait la liste des points sur lesquels on doit se concentrer pour la posture. Et on les apprend par cœur, à force de les répéter. On passe des mois et des années à vérifier que nos mains, nos épaules, notre nuque sont bien positionnées. On répète cela dans l’esprit, et cela s’inscrit en nous. Cette posture devient une option avec tout notre corps et notre esprit. On s’assoit, on rejoint le centre de nous-mêmes, on est calmes. Parfois, des solutions apparaissent à nos problèmes, mais il ne faut pas les chercher, elles viennent d’elles-mêmes. Cela se manifeste de plus en plus facilement et de plus en plus fortement.
– Maître Deshimaru dit que zazen c’est l’assise, mais est-ce qu’il y a une prolongation dans la vie quotidienne? Il ne s’agit pas d’utiliser zazen comme un outil, mais est-ce qu’il y a une prolongation, comme dans kinhin?
– Maître Dogen l’explique exactement. Il dit que c’est comme un coup de gong. Le son résonne dans notre vie pendant un certain temps, puis continue même quand on ne l’entend plus, influençant notre vie. Si on arrête de pratiquer, la vibration s’arrête.
Le kinhin est très utile pour cela. Mais même moi, je le dis et je ne le pratique pas toujours. C’est gênant parfois quand on est avec des amis et tout d’un coup on se met en kinhin. Mais on peut le pratiquer une seconde ou deux, ou une minute, n’importe quand dans la journée, lors de votre pause cigarette, par exemple. Ça remet les idées en place immédiatement. C’est un instrument pour ajuster notre fréquence à l’ordre naturel des choses. Pas besoin de longtemps. Les pensées se calment, on se calme et on rentre à l’intérieur.
Vous avez le droit d’utiliser cela dans votre vie quotidienne. Vous pouvez l’utiliser comme un outil.
La réponse zen à une agression
Le kinhin, c’est la marche très lente. Vous faites un pas ou deux en kinhin dans la journée, c’est déjà très efficace.
Je n’ai pas pu pratiquer le zazen pendant plus de six mois à cause d’un accident au genou. J’étais habitué à pratiquer le zazen depuis 50 ans, c’était quelque chose qui faisait partie de ma vie. Quand je n’ai plus pu le pratiquer, je me sentais mal. Je suis allé jusqu’à pratiquer sur une chaise, c’est mieux que rien. Mais j’ai également commencé à pratiquer le kinhin plusieurs fois dans la journée dès que j’en avais l’occasion.
Si vous avez l’occasion, si vous sentez par exemple monter une tension, un stress, ou si quelqu’un vous agresse, vous vous mettez à pratiquer le kinhin.
Si quelqu’un vous attaque dans la rue, ça va le calmer. Ça calme tout, parce qu’on n’est pas séparé·e·s de ce qui nous environne. En fait, on est lié·e·s, on est relié·e·s, tout est relié ensemble. Donc, s’il y a une personne qui réajuste son esprit, ça influence tout le monde.