– Quelle attitude faut-il adopter au travail en tant que nonne ou moine zen ?
– Je ne sais pas. Je n’ai jamais vraiment travaillé !
Je plaisante. Quand j’étais plus jeune, j’avais un travail de concierge. Mon travail consistait à laver les escaliers et à sortir les poubelles.
Tous les matins, à cinq heures, je devais descendre pour sortir les poubelles et les amener au camion. Quant à l’escalier, c’était une véritable horreur : il y avait de la saleté partout, même des excréments de chien. J’ai commencé à nettoyer tout ça, et au début, je me disais : « Mais ça n’a rien à voir avec le dojo, avec le zen… Tant pis. »
Puis, petit à petit, je me suis dit : « Et si c’était un temple ? Et si je faisais ce travail comme si je servais dans un temple ? » Alors je me suis mis à travailler de cette manière, avec cet esprit.
Un jour, Sensei m’a demandé :
— Stéphane, je voudrais que vous fassiez le ménage au dojo.
— Bien sûr, ai-je répondu. Je suis libre vendredi prochain, je viendrai le faire.
— Non, non ! Je veux que vous le fassiez tous les jours.
C’est là qu’il m’a rappelé une vieille phrase : « Un jour sans travail est un jour sans manger. »
Mais il ne s’agit pas ici de manger de la nourriture. Non, cela n’a rien à voir avec de la nourriture physique. Cette phrase signifie qu’un jour sans travail est un jour sans manger… du mushotoku.
Mushotoku, c’est une expression bien particulière. Un jour, Sensei avait dit en plaisantant : « You must eat mushotoku! » Ça ne voulait absolument rien dire, et pourtant, cela résonnait. Dire que l’on est moine, que l’on pratique, cela implique de faire son travail – ce que l’on appelle le samu dans le zen.
Le samu, c’est une révolution. Oui, il faut faire une révolution. Moi, je dis toujours cela, mais sans savoir utiliser de cocktails Molotov, bien sûr ! Cela n’a rien à voir. Alors ?
Dans ton travail, il faut pratiquer cela. Et pour résoudre tous les problèmes du monde, il suffit de retrouver cet esprit. Les gens n’ont plus « l’esprit du samu», cet esprit simple et humble du travail bien fait. Ils ne mangent plus de mushotoku. Ils mangent des hamburgers et boivent des Coca-Cola.
Si quelqu’un te dit :
— Mais, attendez, il est six heures et demie ! Pourquoi n’êtes-vous pas encore sorti ? Tout le monde est déjà parti.
Alors tu le regardes calmement et tu lui réponds :
— Moi, je pratique le samu. Ce que je veux manger ? Mushotoku.
C’est quoi, le Mushotoku ? J’en veux !
Nous devons vraiment enseigner cet esprit sans avoir peur. Soyez fiers d’être des disciples, d’être des moines, et d’être des disciples de Maître Deshimaru.