Published: 18/03/2012 | Updated: 14/11/2024
Pendant le zazen, le regard revêt une importance fondamentale. Les yeux sont une ouverture vers l’extérieur, une “porte de l’âme”. C’est par eux que nous recevons des informations visuelles, lesquelles sont ensuite interprétées par le cerveau. En réalité, ce n’est pas les yeux qui “voient”, mais bien le cerveau qui traite les perceptions reçues. Ainsi, lorsque nous pratiquons le zazen — une méditation, contemplation, et observation — le rôle du regard, c’est-à-dire ce qui passe par les yeux, devient essentiel.
Cette vision lors du zazen est conditionnée par plusieurs éléments : les yeux, le nerf optique, mais également l’attitude du cerveau. Comme mentionné, c’est bien le cerveau qui interprète les informations visuelles, ce qui rend cette expérience complexe à expliquer. De nombreux débutants s’interrogent : “Que doit-on faire avec les yeux ? Comment doit-on regarder ?”
Cet apprentissage est long, car même après quarante ans de pratique, j’approfondis encore ce sujet pour comprendre comment l’incarner pleinement.
Dans la posture de zazen, on garde la tête droite et le regard posé à quarante-cinq degrés vers le sol. La posture traditionnelle prescrit de maintenir les yeux ouverts. Pendant longtemps, j’enseignais cette consigne à mes disciples, insistant pour qu’ils évitent de “loucher”. Toutefois, après des années de pratique, j’ai réalisé que maintenir cette posture oculaire sans rigidité est primordial.
Il existe trois principales postures pour le regard : garder les yeux fermés, les entrouvrir, ou les garder ouverts.
Fermer les yeux conduit souvent au sommeil ou à une introspection profonde ; les garder entrouverts peut entraîner un léger “louchement” ; enfin, les ouvrir entièrement permet de voir la réalité comme une illusion et vice versa. Cette vision est conditionnée par notre esprit, par la conscience elle-même.
Personnellement, cela fait treize ans que j’ai cessé de forcer mon regard pour éviter de loucher. Finalement, j’ai abandonné cette contrainte, revenant à ma pratique initiale. J’ai observé qu’en louchant légèrement, on reste concentré et conscient de sa posture sans sombrer dans le sommeil, ce qui peut arriver quand on ferme les yeux.
La souplesse est cruciale : ne pas s’enfermer dans une habitude rigide, comme fermer systématiquement les yeux ou loucher, est essentiel. En pratiquant ainsi, on apprend à focaliser et à “défocaliser” rapidement, un peu comme une caméra ou un appareil photo. En maintenant une vision ouverte, sans fixer l’attention sur un point précis, on peut percevoir le tout sans focalisation spécifique.
Cette pratique est aussi bénéfique en dehors du zazen, par exemple dans la nature. Si l’on observe le ciel sans fixer un point particulier, on est capable de percevoir la totalité de la scène et de remarquer le moindre mouvement, qu’il s’agisse d’un satellite, d’une étoile filante, ou d’un simple souffle de vent.
Développer cette vision permet même de percevoir l’aura et l’énergie des autres. Certains sages parviennent à vivre avec cette perception dans la vie quotidienne, voyant l’énergie des personnes sans se concentrer sur leur apparence physique. Ils voient au-delà des “sacs de peau”, des “sacs de viande” : ils perçoivent l’“œuf énergétique” des êtres, parfois même à une centaine de mètres.